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RODRIGUEZ Ferdinand alias Pie

 Ferdinand Rodriguez-Redington alias « Pie »

  •  vrai nom : Edward Rodney
  • né le 31/05/1915  à Bladon, Oxfordshire (RU) 
  • d'un père espagnol et d'une mère anglaise 
  • expert - comptable
  • Ex-officier du BCRA, Opérateur radio britannique, détaché auprès du réseau Alliance par le SOE à partir d'octobre 1942.
  • Arrive en France le 26 octobre 1942 sur l'aérodrome de Tallamy pour créer une centrale radio, il  devient responsable des transmetteurs  pour la France en remplacement de "Perroquet" rapatrié en Angleterre. Il transporte un peu partout en France des émetteurs radio. Il assure ses propres émissions du PC et met au point un un système de coordination entre le PC et chaque secteur, ce qui se révèle très efficace. Le service radio est essentiel, il est placé sous la responsabilité de Rodriguez qui a des assistants. Il se déplace partout en France ( Dordogne, Bordeaux, Carentan, Bayeux, Paris, Rennes...)

  • Il viendra à Bayeux à la Maison des gouverneurs  pour organiser  et animer  un centre d'émission  radio au service d'Alliance, lieu où vivent les deux "colombes de la tour", Germaine Limeul (32 ans en 1940) et Julia Picot (38 ans en 1940) institutrices à Bayeux.
  • Il participe activement à la vie du réseau en contact permanent avec MM Méric et Léon Faye
  • Le 10 novembre 1942, la police française de Marseille fait une descente dans les bureaux du réseau. Marie-Madeleine Méric (le nom de mariée de Marie-Madeleine Fourcade), Monique Bontinck dite « Hermine », estafette, et Ferdinand Rodriguez-Reddington dit « Pie », le radio, s’échappent avec la complicité de policiers bienveillants.
  • Début 1943, environ 40 postes de radio fonctionnent dans toute la France, les opérateurs radios doivent souvent déménager par sécurité. Les textes en clair sont cryptés, seule la centrale britannique peut décrypter. Les allemands  entendent  et cherchent sans cesse à casser les codes. A partir de  1942 le modèle de radio le plus utilisé est le  "Mark II" tenant dans une valise et pesant 15 kilos.


    Le  poste de radio  "Mark II"

    Ce poste émetteur récepteur valise type 3 MK II, également connu sous le nom « B2 », a été conçu en 1942 par le Major John L. Brown. Il était destiné à équiper les agents de renseignements du Special Operations Executive (SOE) et les résistants des pays occupés par les Allemands. C’était l’un des appareils clandestins les plus perfectionnés. Le compartiment de gauche contient les accessoires (manipulateur miniature, fil d’antenne, cordon secteur et batterie, casque, lampes de rechange...). Le compartiment central contient l’émetteur dans la partie supérieure et le récepteur dans la partie inférieure. Le compartiment de droite contient l’alimentation secteur-batterie. L’ensemble pèse près de 15 kilos.

    Comment se réalise une communication radio ?
    Cela commence par la lecture en langage courant ( « en clair ») d’un renseignement à transmettre. Une codeuse le transforme, par un procédé de cryptage, en une série de lettres sans signification apparente.
    Pendant ce temps, l’opérateur radio règle son émetteur clandestin de façon à être perçu par la « centrale » de Londres » : une fois branché sur courant alternatif, chaque émetteur est repérable grâce à son « quartz », une lamelle de cristal qui a pour propriété de stabiliser les ondes radio sur une fréquence unique, déterminée par l’épaisseur de la lamelle.
    L’opérateur radio transmet ensuite le message codé par alphabet morse : chaque pression sur sa machine équivaut à couper le courant de la fréquence, permettant d’émettre un signal court ou long. L’antenne, qui transmet les signaux émis vers l’extérieur, est généralement fixée artisanalement en hauteur à l’intérieur de la pièce, pour ne pas attirer l’attention.
    Dans la rue, la menace vient des voitures allemandes équipées de « gonio » (système de repérage radiogoniométrique, avec antenne rotative). Trois d’entre elles, en cumulant leurs données, peuvent rapidement circonscrire le secteur d’où viennent les ondes émises, puis repérer l’endroit où le champ est le plus intense.
    Source: Pierre Lorain, Armement clandestin. SOE France 1941-1944

  • Repart à Londres en août  1943 pour régler les problèmes entre la Centrale et le réseau.
  • Le 16 septembre 1943, Rodriguez est de retour de Londres accompagné de Faye, d'une estafette et de quatre opérateurs radio. Un Westland Lysander anglais le dépose à 45 km de Paris (Bouillancy, près de Nanteuil-le-Haudouin). Le responsable des transports aériens, Pierre Dallas, les reçoit accompagné de Sneyers et de Lien ; il est décidé, malgré les règles de sécurité, de réunir tout le monde dans un seul wagon du premier train du matin pour filer vers Paris, gare du Nord. Mais en gare d'Aulnay-sous-Bois, les agents allemand et la Milice interviennent brusquement. L'Oberleutnant Merk en personne monte dans le wagon et s'installe dans le compartiment voyageur en face du résistant français et le questionne : « Avez-vous fait bon voyage en Angleterre, Monsieur Faye ? ». Le coup de filet est brutal et efficace. Dans le même temps, les différents PC de Paris reçoivent également la visite de la Gestapo ; si l'état-major peut s'échapper, les radios, les « Apaches » et certains agents du PC renseignements sont pris. Le 21 septembre, c'est en province que les arrestations commencent : les régions Bretagne, Est, Centre, sont ravagés.
  • Le 27 janvier 1944, Transporté de Paris Fresnes à  Strasbourg  puis transféré  à Kehl puis à Schwabische-Hall. Condamné à mort. Miraculeusement échangé  contre des prisonniers allemands et libéré le 14 janvier 1945. Il a beaucoup de difficultés (morales et physiques)  à se remettre de son incarcération. (Lire  ci-dessous )
  • Il participe à l'arrestation de JP Lien, qui a en particulier trahi Faye. Un soir de printemps 1945, il le reconnait dans un bar parisien, alerte la police qui arrête Lien qui sera condamné à mort.
  • Début 1945, il accompagne MM Méric dans l'est de la France et en Allemagne à la recherche des disparus d'Alliance. Ils feront des découvertes terrifiantes.

  • Marié  à Monique Bontinck (nom de code Hermine) en juin 1945. Estafette de la patrouille Turenne. Secrétaire du PC après novembre 1941. Arrêtée, puis échappée avec le PC de Marseille en novembre 1942. Officier de la Légion d'honneur, croix de guerre 1939-1945 avec palmes,
  • Médailles Distinguished Conduct Medal, médaille du combattant volontaire de la Résistance, médaille de la déportation pour faits de Résistance, officier de l'Ordre du Mérite ivoirien,
  • Décédé le 22 janvier 1999, dans sa quatre-vingt quatrième année.


  • A publié Ferdinand Rodriguez (Auteur), Robert Hervet , L'Escalier sans retour (autre titre "L'escalier de fer", Paris, France-Empire, 1958, 303 p., prix littéraire de la Résistance1961 décerné par le Comité d'action de la Résistance (CAR) (notice BnF no FRBNF32578333) Le capitaine Rodriguez a offert le montant de son prix aux œuvres sociales de la Résistance.
Présentation de  "L'escalier sans retour" ou " Escalier de fer"  le Monde 10 /01/ 1959

En septembre 1943 des membres du réseau Alliance, parmi lesquels un de ses chefs, le commandant
Faye, et un officier anglais, le captain F.-E. Rodriguez, furent capturés par les Allemands à Aulnay-sous-Bois quelques heures après leur arrivée clandestine de Londres (1). Chacun de leur côté. Faye et Rodriguez, l'auteur de l'Escalier de Fer, s'étaient inquiétés des circonstances bizarres qui avaient entouré leur arrivée. Ils n'avaient pas osé se le dire. Interrogatoire, emprisonnement à Fresnes, à Kehl, puis à Fribourg-en-Brisgau. Rodriguez est jugé par un tribunal militaire et condamné à mort, de même que ses camarades de réseau. Transféré à Schwabische-Hall, Rodiguez entend une nuit, sur l'escalier de fer de la prison, les pas de vingt-quatre de ses compagnons qui partent pour le supplice. Enchaîné, décharné, attendant à chaque aube la mort, il retrouve un jour, à l'occasion d'un nouveau transfert, le commandant Faye, encore épargné lui aussi. Dans un cul-de-basse-fosse, a Sonnenburg-en-Brisgau, où Rodriguez est enfermé à côté de Faye et d'un jeune Irlandais du réseau, la terrible attente reprend. Le matin du 14 janvier 1945 la porte de la cellule de l'officier britannique s'ouvre : le directeur de la prison lui annonce qu'il est échangé, et il rentre en Angleterre par la Suisse et la France libérée. Un jour, dans un bar, il retrouve l'homme qui les a trahis et le livre à la police. Le commandant Faye et ses compagnons survivants ont été exécutés sommairement par les SS dans la nuit du 30 janvier 1945.

L'ouvrage du captain Rodriguez, par sa résonance humaine et par la foi profonde qui s'en dégage, est comparable au beau livre de M. Michelet sur les camps de concentration, Rue de la Liberté.

L'Escalier de Fer c'est en effet à la fois celui de Schwabische-Hall, où résonnent les pas des condamnés, tandis que, dans sa cellule, Rodriguez écoute les portes des cellules s'ouvrir tour à tour sur la mort et attend que tourne le verrou de son propre cachot ; c'est aussi la progression d'un croyant vers son Dieu. La solitude, la souffrance et la perspective constante de la mort n'arrivent pas à contraindre au désespoir un homme qui jamais ne cache pourtant ses défaillances. Et lorsque, enfin libéré, l'officier se retrouve dans le monde des vivants, il restera longtemps muré dans le grave silence de celui qui a abordé aux rives de la mort et y est demeuré longtemps ancré. Le silence aussi du rescapé, brusquement arraché au supplice, tandis que ses camarades de souffrance continuaient dans les cachots de Sonnenburg d'attendre, enchaînés, l'arrivée des SS qui les mitraillèrent après les avoir fait s'étendre à plat ventre sur le sol.



En savoir plus sur l'utilisation de la radio pour communiquer
la radio dans la résistance




Sources 

La radio, l'outil du renseignement

LA RADIO

Quelques explications simples  sont nécessaires pour comprendre le fonctionnement des liaisons radio et le rôle de l'opérateur radio.


  • Les liaisons radio 
Une liaison radio clandestine est un échange de messages codés transmis par radio. Ces messages s'échangent entre
-un émetteur fixe appelé "La Centrale" ou "Home Station", installé en territoire libre, l'Angleterre ou l'Algérie libérée.



et

 
-un émetteur-récepteur mobile appelé "La Station" ou "Out Station", fonctionnant en territoire contrôlé par l'ennemi, la France.


  • Les messages
Le message est un télégramme une fois décodé. Il doit faire codé 50 lignes maximum, 80 sont autorisés pour un rapport.












Message codé

Le message « en clair » est transcrit en un texte codé que seul le destinataire doit comprendre. Le message codé est formé de groupes de cinq lettres sans signification apparente. Cette transcription peut être faite selon des procédés divers. Ces procédés ont par ailleurs évolué entre le début et la fin de la guerre, et se sont perfectionnés. Les principaux procédés de codage employés par les services français seront la « double transposition » et le « système A-Z »
On part d'une phrase convenue, facile à retenir par cœur, Exemple  : Rien ne sert de courir. A partir de cette phrase on établit la « clé » et on procède  à des transpositions.

Ils sont émis dans les deux sens :
-de France vers Angleterre, au cours d'une émission (ou vacation) du poste clandestin,
-de l'Angleterre vers la France, par émission "en l'air" (Broadcast) faite par un émetteur de/forte puissance.
En France, un opérateur spécialisé dit "opérateur-broadcast" se met à l'écoute à des heures et sur des longueurs d'onde (fréquences) convenues. Il capte ainsi les messages qui lui sont destinés. Cet opérateur ne dispose que d'un récepteur et ne peut émettre lui-même. Il n'est donc pas repérable par l'écoute ennemie, mais il ne peut pas accuser réception sur-le-champ des messages qui lui sont transmis.

  • Conditions techniques
La liaison doit être assurée du Nord   (200 km) comme du Sud (1300 km).
On doit pouvoir disposer d'un grand nombre de longueurs d'onde (fréquences). Ces fréquences doivent être nettement séparées les unes des autres pour éviter des interférences. On doit disposer d'une puissance suffisante pour être entendu par la Centrale sans cependant perturber les récepteurs situés au voisinage de l'émetteur.
Ces conditions obligent à employer :
-les ondes courtes de 60 à 35 mètres de longueur d'onde (soit 5 à 9 Mc/s),
-la radiotélégraphie (signaux morse produits par un manipulateur) et non la radiotéléphonie (paroles transmises par microphone),
-des postes clandestins d'une puissance comprise entre 5 et 20 watts-antenne.


  • Le matériel
    •  la Centrale de Londres : émetteurs et récepteurs sont du matériel lourd, professionnel, puissant pour les premiers, sensible pour les seconds, généralement pourvus d'antennes à faisceau dirigé. Ils sont dispersés en plusieurs centres, discrètement implantés à la campagne, loin des parasites de la ville. Ils sont sévèrement gardés.
    • Stations clandestines : émetteurs-récepteurs miniaturisés, en postes-valises, faciles à transporter et à camoufler, mais de très faible puissance et souvent pourvus d'antennes d'efficacité médiocre.
Entre le début et la fin de la guerre, ce matériel a subi des perfectionnements considérables, ainsi le poids a évolué de 20 kg en 1941 à 4 kg en 1944.



Le poste émetteur-récepteur de loin le plus utilisé est le AMK II ou valise B2 . Sa constitution en trois boîtes séparées, récepteur/émetteur/alimentation, facilite son camouflage.

Le  poste de radio  "Mark II"

Ce poste émetteur récepteur valise type 3 MK II, également connu sous le nom « B2 », a été conçu en 1942 par le Major John L. Brown. Il était destiné à équiper les agents de renseignements du Special Operations Executive (SOE) et les résistants des pays occupés par les Allemands. C’était l’un des appareils clandestins les plus perfectionnés. Le compartiment de gauche contient les accessoires (manipulateur miniature, fil d’antenne, cordon secteur et batterie, casque, lampes de rechange...). Le compartiment central contient l’émetteur dans la partie supérieure et le récepteur dans la partie inférieure. Le compartiment de droite contient l’alimentation secteur-batterie. L’ensemble pèse près de 15 kilos

Le transport de ce matériel depuis sa fabrication en Angleterre jusqu'à son utilisation en France comporte deux phases.
-parachutage en France dans des containers où se trouvent rassemblés les émetteurs-récepteurs, les dispositifs d'alimentation, les accumulateurs et les chargeurs de ceux-ci, à main ou à pédales, les quartz, les plans de travail, les codes, etc. L'exécution de cette opération incombait aux services spécialisés de la Royal Air Force et aux équipes d'atterrissage et de parachutage de la Résistance.

-Répartition du matériel entre les utilisateurs.

Ensuite il faudra le déplacer continuellement pour le soustraire aux recherches de la Funkabwehr dès lors qu'il est entré en fonction et qu'il a donc été repéré. Le transport reste toujours une opération risquée.


  • Le repérage ennemi
Le plus grand danger réside cependant dans la localisation de l'émission par le repérage allemand.

Pour comprendre comment repérer une émission, il faut d'abord comprendre comment se propagent les ondes radio:
La propagation des ondes radio se fait en cercles concentriques autour de l'antenne de l'émetteur. On peut la comparer aux vagues produites sur un plan d'eau par la chute d'une pierre.

Les ondes courtes se propagent de deux façons différentes :
-le long de la surface du sol : c'est l'onde directe. Elle peut être perçue immédiatement autour de l'émetteur mais dans un rayon de seulement quelques kilomètres. Cette portée est diminuée par un terrain accidenté ou absorbant. Elle est augmentée avec la puissance de l'émetteur.
-vers le ciel où les ondes rencontrent une couche réfléchissante en haute atmosphère. Cette couche, telle un miroir, renvoie l'onde vers le sol où elle peut être à nouveau perçue. La distance que peut atteindre cette onde réfléchie, dépend de la hauteur de la couche réfléchissante, variable avec la position du soleil, donc avec l'heure, et avec la saison et de la fréquence employée pour émettre.

Cette onde doit atteindre la centrale si la fréquence est correctement choisie en fonction de la distance avec Londres et de l'heure.
C'est cette même onde qui est perçue par les stations d'écoute et de repérage allemandes. Ces stations allemandes sont réparties sur toute l'Europe. L'émission clandestine est donc toujours entendue par les Allemands.


  • Processus du repérage par l'ennemi
Dès qu'il entend l'émetteur clandestin, le poste ennemi d'écoute alerte plusieurs stations de repérage.

Chaque station de repérage situe immédiatement par goniométrie la direction de l'émetteur par rapport à sa propre implantation. Les directions relevées par les différentes stations sont tracées sur une carte et se recoupent au lieu de l'émission : 2 à 3 minutes.

Cependant ce relèvement est fait à grande distance et sur l'onde réfléchie. Sa précision n'est pas totale. En réalité les Allemands viennent de déterminer un triangle d'environ 20 km de côtés dans lequel se situe le clandestin en train d'émettre. L'utilisation par l'ennemi d'un petit avion qui venait survoler le lieu d'émission a été signalée à plusieurs reprises.



Il est certain que le repérage radiogoniométrique opéré par un avion est d'une grande précision, parce que les signaux reçus ne sont pas affectés par des réflexions parasites sur des obstacles au sol. Dans un tel cas l'opérateur devait suspendre son émission après avoir émis le signal QAG (danger) pour prévenir la Centrale de Londres.

Le service de repérage alerte immédiatement l'équipe d'intervention la plus proche du triangle. Deux voitures partent aussitôt. Elles sont équipées de moyens de repérage et comprennent une équipe d'intervention armée.

Les voitures évoluent maintenant dans le champ de l'onde directe (onde au sol). Celle-ci permet de situer l'émetteur avec une précision absolue, au point de déterminer une chambre dans un hôtel. Pour échapper à cette véritable chasse, le gibier, notre radio, dispose de plusieurs moyens, les uns dépendant directement de lui, les autres ayant été prévus par Londres.


  • Comment échapper au repérage allemand ?
Règles fondamentales: 
-Ne jamais émettre pendant plus de 10 minutes sur une même fréquence (longueur d'onde). 
-Changer de fréquence même en cours d'émission. 
-Ne pas dépasser au total 20 à 30 minutes à chaque émission.

Le commando allemand recherche le clandestin à l'intérieur du triangle relevé par le repérage à grande distance. Il se trouve au maximum à une vingtaine de kilomètres du lieu de l'émission C'est donc l'onde au sol, onde directe, qui lui sert de fil conducteur. D'où la deuxième règle : limiter la portée de cette onde au sol en utilisant une puissance réduite, une antenne courte mais bien orientée vers Londres.

Notre opérateur clandestin se trouve devant son poste, écouteurs aux oreilles, concentré sur les signaux morse qu'il entend et sur ceux qu'il émet. Ainsi isolé de l'extérieur il risque d'être surpris par le commando. D'où la troisième règle : placer des guetteurs autour du lieu de l'émission. Ceux-ci feront stopper l'émission au moindre signe suspect. Les Allemands emploieront des voitures banalisées afin de pouvoir approcher l'émetteur sans éveiller l'attention ou utiliseront des déguisements pour le personnel à pied (ex : une bonne d'enfant poussant un landau).

Le radio changera son lieu d'émission aussi souvent que possible. L'idéal consiste à disposer de plusieurs emplacements, tous équipés d'un émetteur. L'opérateur évitera de résider dans un de ses lieux d'émission.


  • Organisation du  plan de travail
Toutes ces mesures de sécurité prises personnellement seraient dérisoires si le travail n'était étroitement encadré par une organisation au sommet. Cette organisation affecte à chaque opérateur un plan de travail personnalisé qui l'identifie auprès de la Centrale. Ce plan de travail personnel prévoit les dates et les heures auxquelles la Centrale écoute cet opérateur. Il définit la fréquence à employer par le clandestin et celle qu'emploiera la Centrale pour lui répondre. Il précise enfin les signaux d'appel (indicatif de 3 lettres) qu'utilisera le clandestin pour appeler et celui à utiliser par la Centrale pour répondre.
Ces plans de travail individuels font partie d'un plan d'ensemble. Ils sont conçus pour faciliter le trafic radio par un choix judicieux de la fréquence se propageant le mieux, compte tenu de l'heure de l'émission et de la distance avec Londres.

Plan de transmission

Ils sont aussi conçus pour dérouter l'écoute allemande et donc contribuent à la sécurité de l'opérateur. Par exemple :
-à 14 heures 30, un clandestin appelle la Centrale sur la fréquence 7850 en employant l'indicatif d'appel PRE. Ce clandestin travaille dans la région de Strasbourg.
-à 15 h 30 un autre clandestin appelle la Centrale sur la même fréquence (7850) en employant le même indicatif d'appel (PRE). Ce deuxième clandestin travaille dans la région de Bordeaux.

Les services d'écoute allemands ne peuvent donc plus attribuer l'appel PRE sur 7850 à un poste déterminé (Strasbourg par exemple), il leur faudra à chaque fois procéder d'abord à un relèvement. Ce n'est là qu'un exemple des astuces technologiques employées pour déjouer les mesures ennemies.

Il est clair que ces conditions de travail exigent du radio clandestin à la fois des qualités générales et des qualifications techniques. Le courage physique doit être complété par le sang-froid. À chaque émission le radio "sort de l'ombre" et s'expose volontairement. Chaque pression sur le bouton de son manipulateur constitue un appel à l'ennemi, une sorte de défi qui lui est lancé.

Et cependant, du début à la fin de chaque émission, le radio doit rester en possession de tous ses moyens.

La qualification technique est évidemment indispensable. Une manipulation malhabile ou lente attire immédiatement l'attention des services d'écoute ennemie et allonge la durée de l'émission.

Il est donc très important que l'opérateur clandestin soit bien entraîné à la lecture au son et à la manipulation des signaux morse. Le meilleur choix que l'on peut faire consiste à s'adresser à des professionnels pour qui ces deux activités sont familières.

Il est nécessaire, en effet, de les choisir capables de lire des signaux même faibles et brouillés par des interférences avec d'autres signaux ou par des parasites et aussi de ne commettre aucune erreur aussi bien à l'audition qu'à la transmission car les messages reçus ou transmis sont codés, de telle sorte qu'une lettre manquante ou mal transmise ne peut être devinée ou rectifiée par référence au reste du message.

Il convient donc dans toute la mesure du possible d'engager des professionnels dont on complétera l'instruction par toute une série d'indications propres à la radio clandestine à savoir :
  • l'utilisation des appareils miniaturisés,
  • l'utilisation des plans de travail,
  • la procédure spéciale à employer en cours de travail,
  • le codage et le décodage des messages relatifs à l'exploitation radio. Chaque opérateur doit, en effet, disposer d'un code qui lui soit propre pour pouvoir correspondre pour son propre compte avec la Centrale et cela indépendamment des codes qui servent à chiffrer le trafic qu'il est chargé de recevoir ou de transmettre, codes qu'il ne connaît pas,
  • les règles de sécurité à observer pour le choix d'un emplacement d'émission, le camouflage du matériel après utilisation, la protection pendant l'émission et les relations avec les agents de liaison.


  • Description d'une émission
Quelques minutes avant l'heure du rendez-vous avec Londres, l'opérateur arrive au lieu de l'émission. Un ou plusieurs guetteurs extérieurs sont en place.

Sortir l'appareil de sa cachette, le poser sur une table, dérouler le fil d'antenne sur 10 à 15 mètres (à la campagne il va se perdre dans un arbre, à la ville il zigzague d'un mur à l'autre de la pièce), relier l'appareil à une prise de courant (ou à une batterie) enficher le quartz fixant la longueur d'onde prévue, régler l'émetteur et le récepteur ; tout cela se fait en quelques minutes dans des conditions normales.

À la seconde prévue pour la prise de contact, l'opérateur lance 5 ou 6 fois son indicatif d'appel. Dès que la Centrale le perçoit, elle répond en émettant son propre indicatif. À partir de ce moment le trafic s'enchaîne : calmement mais rapidement les signaux morse crépitent, les messages sont transmis un par un, le tout entrecoupé de quelques changements de longueur d'ondes. Pendant tout ce temps le radio reste très conscient de l'écoute ennemie.

Seul un grand entraînement lui permet de se défaire d'une certaine nervosité, préjudiciable à la qualité et à la précision du travail. Vingt à trente minutes plus tard, le signal de fin de transmission est échangé, quelquefois accompagné d'une appréciation de la Centrale : "FB" (Fine Business : bon travail).

Il ne reste plus qu'à tout replier, détruire les messages transmis, effacer toute trace de ce qui vient de se passer.

Pendant ces trente minutes, ont été transmis des renseignements sur l'ennemi, des comptes rendus de sabotages et d'opérations aériennes… La liaison vitale entre les Forces françaises de l'intérieur et les Alliés de l'extérieur a été maintenue. Cette émission de trente minutes a cependant nécessité un long et dangereux travail de préparation assumé par les agents de liaison et de protection.

Le rôle de ces hommes et femmes, parfois de très jeunes gens, est à la fois capital et ingrat.





Sources