Sympathisants mais libérés

 Un sympathisant, c'est quoi ?

Un sympathisant est une personne qui s'intéresse à une action politique et en approuve l'essentiel. Selon son degré de sympathie, il peut en adopter les idées, soutenir ses représentants sans, toutefois, s'afficher publiquement et s'engager dans l'action.

Pour ce qui est des sympathisants dans la résistance, le terme pose problème tant il recouvre des aspects multiformes. Ce terme ambigu concerne une personne plus ou moins proche d'un résistant (famille, ami, voisin, collègue) qui peut avoir fourni ponctuellement un service.
Aussi, ce terme ne peut être utilisé que pour évoquer une personne active, qui, par exemple, se contentera  d'une simple aide, légère, sans gros risque, discrète, mais répétée : distribuer des tracts, du courrier ou cacher des documents. 

On ne peut être considéré comme "sympathisant " pour avoir une activité passive:
- pour une lecture d'un journal clandestin 
- car on connait un résistant ( famille, ami, voisin, collègue)

 D'ailleurs beaucoup de français ont "aidé " directement ou indirectement à un moment de leur vie, de manière ponctuelle, la résistance, pour  autant ils ne  prétendent pas être un sympathisant actif. Il ne suffit pas, non plus, d'avoir été arrêté, puis libéré pour se prétendre résistant ou sympathisant, en effet beaucoup de français ont été arrêtés pour peu de choses, voire, par erreur ou dénonciation anonyme.

De là, l'ambiguïté de ce terme, trop utilisé, y compris par  :

-Les historiens qui ont tendance  à classer un  peu trop vite une personne méconnue dans cette catégorie, souvent un proche d'un résistant (voisin, ami, membre de la famille...)
-Les associations liées à la résistance qui classent par simplisme certaines personnes comme "sympathisant" par facilité, cas des personnes arrêtées (et relâchées) par la Gestapo 
-Les membres de la famille qui prétendent, bien des années plus tard, sans aucune preuve ou archive, que le grand père ou grand oncle était un résistant ! 


Les "sympathisants" du réseau Alliance, secteur Ferme

  • "Sympathisant" : ce terme est essentiellement utilisé après la guerre  pour  les personnes arrêtées et relâchées dans le cadre d'Alliance, sans jamais fournir un seul fait de résistance. Il semble que ce soit un terme utilisé par "facilité" pour dénommer ces personnes arrêtées  en même temps que des résistants du groupe Alliance ( cas évident de Madame Marcelle Caby  arrêtée mais rapidement relâchée )
  • Aujourd'hui,  l'association Alliance  indique " Les sympathisants sont des résistants, non inscrit, sur la liste officielle du réseau Alliance. Ce sont généralement des personnes de la famille de l'agent Alliance ou des résistants amis qui, appartenant à un autre réseau, relayaient des informations pour le compte d'un agent d'Alliance ou ne font que boîte aux lettres. Ils peuvent avoir été victimes du nazisme au titre de leur activité dans leur propre réseau."
  • Qui sont-ils ?

    CHIRON Marcel
    • Né le 26 janvier 1898 à la Bouëxiere (I et V)
    • Profession quincaillier
    • Résidant à Villers Bocage
    • Sympathisant ? : sympathisant ou résistant au sein du réseau Hector ( à vérifier) et sympathisant  du réseau Alliance (secteur de Villers Bocage). son nom est cité une fois par Langeard.  Sympathisant probable
    • Arrêté le 4 mai 1944
    • Libéré le 12 mai 1944

    OLARD Charles
    • Né le 2 septembre 1902 à Pleugueneuc (I et V)
    • Profession :Facteur
    • Résidant à Saint Laurent su mer
    • N’appartient pas au réseau Alliance mais il a la spécificité d'être le beau frère de  Jean Caby et d'être collègue (facteurs) et voisin de D Lemière et R  Boulard.
    • Arrêté le 5 mai 1944
    • Libéré le 12 mai 1944. Pourtant son  nom est cité plusieurs fois lors des interrogatoires. Cas douteux ayant eu, après la guerre, une renommée locale de "collabo"  (non justifiée par des  documents) défendu aujourd'hui par un "neveu" qui prolifère des affirmations ridicules et sans fondement, démenties par les sources historiques.  N'est pas  sympathisant.

    THOREL Julien

    • Né le 16 novembre 1911 à Landes sur Ajon
    • Profession :
    • Résidant à
    • Sympathisant ? son nom est cité une fois par Langeard.  Sympathisant probable
    • Arrêté le 4 mai 1944
    • Libéré le 12 mai 1944

    LOISEL Octave

    • Né le 7 mars 1914 à Cahagnes
    • Profession 
    • Résidant à
    • Alliance : Son nom n’est jamais cité dans les interrogatoires. Ne semble pas être un sympathisant
    • Arrêté le 4 mai 1944
    • Libéré le 12 mai 1944

  • Pourquoi sont-ils arrêtés  d'après les rapports allemands?
Il faut noter que lors d'arrestations de résistants, on arrête aussi toute "personne proche". Ainsi de nombreux français ont été arrêtés sans raison réelle, le plus souvent rapidement libérés.
Ainsi :
- l'épouse de Jean Caby, Marcelle a aussi été arrêtée mais relâchée le 11 mai. Ensuite, elle a pu voir son mari à l'hôpital où il a été emmené suite aux tortures subies : elle a vu les blessures qu'il portait, en particulier, à la tête, suite au supplice du casque.
-Olard, voisin et collègue de travail de résistants est arrêté en même temps qu'eux le 5 mai mais très rapidement relâché sans être interrogé le 12 mai.

Les rapports indiquent que les arrestations ont été réalisées suite à l'arrestation et aux interrogatoires de  Douin et Gaby or ces derniers ne citent pas ces 4 personnes. 

A noter  que  le nom  de Loisel  n'est jamais cité

Qui évoquent leurs noms?

-Langeard  dans son interrogatoire sous la torture avoue " J'avoue, sous la menace, que je connais d'autres membres. Il s'agit de Aubin de Villers-Bocage, Le Baron, Thorel et Chiron, tous résidant à Villers-Bocage. Mais je n'ai eu affaire qu'à Caby

-Le Baron  dans son interrogatoire  précise que Morel et Chiron ne sont pas des résistants

 :"«Je sais que THOREL et CHIRON, tous deux de Villers-Bocage, connaissaient mon appartenance au groupe de résistance. Toutefois, je déclare, sur demande explicite, que je ne leur ai pas demandé de rejoindre le mouvement"


-Olard : C'est  un "proche" de résistants d'Alliance :
-par son beau frère, Jean Caby, responsable du réseau de Villers Bocage
-par son voisin: Lemière Désiré
-par ses collègues de la Poste : Lemière Désiré et Boulard Robert

Il sera arrêté en même temps qu'eux le 5 mai 1944.

 Il n'a  pas été interrogé (ou, du moins,  il n' y  a pas de trace de son interrogatoire) or son nom est  cité  6 fois dans les autres interrogatoires (le neuvième le plus cité) par Gaby (1 fois) . Il est très rapidement libéré.

Comme je craignais de perdre mon gagne-pain à cause de cette pression exercée sur moi, je me suis tourné un jour vers mon beau-frère, le facteur Charles Olard de St. Laurent s/mer, et je lui ai demandé s'il ne connaissait pas un moyen de sortir, c'est-à-dire que je voulais quitter la région, car je ne pensais plus être en sécurité. Mon beau-frère m'a alors mis en relation avec le fermier Lemière au même endroit. Mais comme il ne pouvait pas non plus aider, il m'a envoyé chez le pêcheur Georges Thomine.

Thomine ( 1 fois) 

J'avoue que pendant la conversation, je lui ai aussi donné des informations sur les défenses côtières que je connais. En avril 1943, j'ai également rencontré GABY, son beau-frère OLARD et LEMIERE, ce dernier m'a dit que Gaby voulait s'échapper. J'ai maintenu un lien avec Gaby par la suite, mais il n'a jamais reçu de messages de ma part.

 Lemière ( 4 fois). 
L'été dernier, Olard, le facteur que je connais bien, qui distribue le courrier dans mon village, est venu me voir et m'a dit que pour l'électricien Caby, qui vit à Villers-Bocage, s'était devenu trop chaud et qu'il prévoyait de fuir en Angleterre. Je ne connaissais ce Caby que brièvement.

D'après le discours de M. Olard, Caby aurait dû se rendre coupable de quelque chose avec du matériel de transmission. Olard m'a demandé si je connaissais quelqu'un, un pêcheur ou un marin, qui pourrait m'aider dans cette affaire. À Port-en-Bessin vivait un pêcheur nommé Thomine, il nous fournissait régulièrement du poisson à ma famille et à moi. Quelques jours après ma conversation avec Olard, Thomine est venu dans mon appartement avec des poissons.


Aussi il peut sembler incompréhensible qu'une personne citée plusieurs fois ne soit pas interrogée par les allemands.
En fait, les interrogatoires démontrent clairement  qu'Olard a joué, par hasard, et,  une seule fois, fin 1941 ou début 1942,  un simple rôle d'intermédiaire pour mettre en contact des personnes qui sont ou vont devenir des résistants d"Alliance :
Caby de Villers Bocage cherche à s'enfuir  en raison de sa  proximité avec le groupe Collaboration et demande  à son beau frère Olard s'il connait quelqu'un qui pourrait l'aider. Olard l'envoie vers son collègue  D Lemière qui lui indique l'adresse de son fournisseur de poissons Thomines de Port en Bessin. Caby va beaucoup parlé avec  Thomines qui le convainc de  devenir résistant, ce qu'il deviendra, particulièrement actif. 


Rien n'indique une quelconque participation, aussi minime soit-elle, à la résistance.  il n'était ni résistant, ni sympathisant.  Au contraire,  de son vivant, il ne s'est jamais expliqué car il n'avait surement rien à dire,  bien qu'il aurait pu parler  de son séjour en prison et des collègues.  Au contraire, dans son village il avait une réputation de "collabo", basée, semble-t-il, sur des rumeurs (rien ne l'atteste à ce jour). Il serait passé devant  un comité de libération de Trévières, mais aucun document ne l'indique.

Plus grave, ces dernières années un neveu affirme, sans jamais avoir montré un seul document, que sa famille  Olard, et en particulier l'oncle Charles était un grand résistant, en enjolivant de pseudos réalisations totalement imaginaires et délirantes..

 Par contre du côté d'Alliance, personne n'indique le moindre fait, aussi minime soit-il, de résistance : il n'était ni résistant, ni sympathisant.  Il était tout simplement  une simple relation (famille, ami, collègues, voisin).
Les archives allemandes actuelles n'évoquent jamais son nom.

Lire l'article dédié : Démystifier le cas Olard"

  • Pourquoi sont-ils libérés ? 

De  fait, ces 4 personnes n'ont pas été interrogées ou l'on n' a pas conservé la trace de leur  interrogatoire (détruit car inutile ? ou compromettant ?).  Elle sont donc libérées, on peut penser en fonction des aveux  :
- Loisel : une libération logique car il semble inconnu par tous...
-Thorel et Chiron : vaguement cités une seule fois par une seule personne sous la torture, donc une libération compréhensible
-Olard: Comme les précédents, s'est retrouvé,  une fois, par sa situation familiale et professionnelle,  par hasard,  à mettre en contact des personnes, membres ou futurs membres d'Alliance.

Ils seront donc  tous les quatre libérés, après une semaine de prison,  le 12 mai 1944. Les rapports allemands indiquent : 

  " Ne pouvaient pas être accusés d'espionnage. "

"plusieurs des personnes arrêtées ont dû être libérées, car il n'a pas été possible de prouver qu'elles avaient été actives au sein de l'organisation d'espionnage ou du groupe de résistance dirigé par Caby".


CONCLUSION
Sur les  4 personnes libérées:

-Thorel et  Chiron sont de probables  "sympathisants"

- Loisel : rien n'indique une quelconque attitude de sympathisant

-Olard est un cas spécial, qui assurément n' a pas été "sympathisant" et qui a eu, de plus,  une attitude douteuse et ambiguë renforcée par le comportement d'un "neveu".


Les rapports officiels allemands : (extraits concernant  uniquement les "libérés)

Rapport du 6 mai 1944 concernant les arrestations




                                            Caen, le 6 mai 1944

1- Note:

Sur la base des interrogatoires des ressortissants français arrêtés dans la présente affaire,
notamment le DOUIN et le GABY, les personnes suivantes ont également été arrêtées dans la
période du 28 avril au 4 mai 44 sur de fortes présomptions d'espionnage ou d'appartenance
à un groupe de résistance :


[...]

2. LOISEL, Octave, né le 7.3.94 à Cahagnes, domicilié à Cahagnes

5. CHIRON, Marcel, né le 26/1/95 à La Bouesière, domicilié à Villers-Bocage

6. THOREL, Julien, né le 16/11/11 à Landes s/Ajon, domicilié Villers-Bocage, 29 rue

Pasteur

11. OLARD, Charles, né le 2/9/02 à Pleugueneue, domicilié à St. Lorent s/mer

[...]





Note du 12 mai 1944 concernant les "personnes libérées"

                                        Caen, le 12 mai 1944
 Note
 Des interrogatoires des principaux participants, plusieurs des personnes arrêtées ont dû être libérées, car il n'a pas été possible de prouver qu'elles avaient été actives au sein de l'organisation d'espionnage ou du groupe de résistance dirigé par Caby. Les personnes concernées sont les ressortissants français suivants :
 1. Loisel,Octave, né le 07/03/94 à Cahanges, domicilié à Cahagnes 
 2. Chiron, Marcel, né le 26/01/95 à La Bouesière, domicilié à Villers-Bocage
 3.Thorel, Julien, né le 16/11/11 à Landes-sur-Agen, domicilié à Villers-Bocage
 4. Olard, Charles, né le 02/09/O2 à Pleugueneue, domicilié à Saint-Laurent sur mer

 Le citoyen français Aubin, André, qui a également été arrêté, a été retiré de l'affaire parce qu'il appartenait depuis un certain temps à une organisation de résistance déjà connue ici, à savoir la "Résistance". Des agents spéciaux de liaison sont affectés à ces enquêtes; ils seront donc pris en charge dans le cadre d'un processus spécial. L'aubergiste Jonneau de Bayeux, mentionné dans l'interrogatoire de Douin, est également connu depuis quelque temps comme un membre de la "Résistance" et un pivot probable de ce mouvement de résistance à travers les rapports de l'agent de liaison. Il sera également traité dans le cadre d'un processus spécial.







Rapport du 3 juillet 1944 (EXTRAIT concernant les arrestations et les libérations)





Le commandant
de la police de sécurité et du SD                                                           Paris le 3 juillet 1944
dans le territoire du commandant
de France                                                                                           GEHEIM

                                                                                                                                 HAFT


Au

a] Commandant de la Sipo et du SD à Paris
bl Rouen
c) Commandant de la Sipo lV.3a Strasbourg

Sujet : Alliance Il
Références : pour a et b : mon écrit du 27.6 1943, pour c : lettre du 19 06 1944
Pièces jointes :
           Pour Kdo (commandant Sipo-SD) de Paris : actes en copies du Kdo de Rouen
           Pour Kdo de Strasbourg : actes originaux
           Pour Kdo de Rouen :néant


Je vous transmets ci-joint les processus pour les investigations plus larges.
Après l'arrestation du chef Truffaut envoyé vers le territoire du Reich ont été arrêtés dans le
territoire du Kdo de Rouen en tant qu'organisation d'espionnage "Alliance ll" les personnes
suivantes :

1. [...]

9. Chiron, Marcel, né le 26.1.1895à La Boueslere, arrêté 4.5.44., relâché le 12.5.1944

10. Thorel, Julien, n é le 16.11.1911, à Landes sur Ajon, arrêté 4.5.1944, relâché le l2.5.1944

15. Olard, Charles, né le 2.9.1902 à Pleugueneue, arrêté 4.5.1944, relâché le 12.5.1944

[...]





Rapport du 15 juillet 1944 : liste des agents fusillés (EXTRAIT concernant les arrestations et les libérations)

Le commandant
 de la police de sécurité et du SD                                                                       Paris le 15 juillet 1944 dans le territoire du commandant
de France                                                                                               GEHEIM

 Au
    a) Commando de mission de la police de sûreté-IV Strasbourg 
    b) Commandant de la police de sûreté et de la division spéciale IV- Dijon
    c) Commandant de la police de sûreté et de la division spéciale IV* Paris

 Pour information :
    d) Bureau central de la sécurité du Reich-IV BI a (Il) Berlin
    e) Le poste de défense ouest III F- Paris

 Objet : organisation Spéciale "Alliance Il "- Giraud-ND

 Affaire : Directives n° I-Il
               Pour le commando de Paris et le S.K. de Strasbourg : une lettre du 3 juillet 1944 
 Annexe : Aucune. 
[...]
Les détenus :
16. CHIRON Marcel, né le 26.1.189S à la Boueslère, Arrêté le 4.5.44 et libéré le 12.5.44
17. LOISEL Octave, ne le 73.1894 å Cahagnes, Arrête le 4.5.4et libéré le 125.44 
18. OLARD Charles né le 2.9.1902à Pleugueneue, Arrêté le 4.5.44 et libère le l2.5.44
 19. THOREL Julien né le 16.11.1911à Landes sur Ajon , Arrêté le 4.5.44 et libéré le 12.5 44

 Ne pouvaient pas être accusés d'espionnage. 
[...]




Voir 




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