Famille de Guy de Saint Pol,
par Marc-Antoine de Saint Pol, madesaintpol@orange.frNOTES
Le livre "Massacre en Normandie ", donne déjà des éléments sur la vie de résistant et de prisonnier de mon père. Sur le site de l'Association L'ALLlANCE (reseaualliance.org) figure une biographie de Guy de Saint Pol. Mes parents ont laissé beaucoup d'archives écrites. Ma mère ne nous a pas laissé de témoignages oraux puisqu'elle est décédée accidentellement le 20 juin 1950. Les éléments que je communique maintenant sont moins connus et peuvent intéresser d'autres familles. Mon père approché par Caby qu'il connaissait bien est entré dans le réseau en mai 1942. En mai 1943 il a reçu trois fois la visite des allemands qui ont fouillé de fond en comble la maison, sans succès. La ferme voisine de Piquenard a subit les mêmes fouilles.
Dans la retranscription n° 22097 Guy de saint Pol y est désigné comme intermédiaire (passeur d'agent). Cela fait allusion au passage de Havart chez mon père. Mais durant cette guerre, un certain nombre de personnes sont passées chez lui à Amayé sur Seulles.
1 / En juin 43, mon père a hébergé deux frères, Jean et Pierre Wichasky qui fuyaient le STO. Il les connaissait car ils venaient de Thouaré sur Loire où habitait sa mère (Loire-Atlantique). En septembre, leur présence commençant à se savoir, Ils décidèrent de partir et vécurent dans la clandestinité jusqu'en 1944, année durant laquelle ils s'engagèrent dans l'armée française.
Ma grande mère, très éprouvée par les deux guerres, n'a pas eu le cœur de m'en parler. Je |'ai appris en décembre 2009 et j'ai pu échanger avec l'un d'entre eux.
2/ La présence d'Havart chez Guy de Saint Pol est pour moi une découverte. Comment Havart qui fuyait sa région d'Amiens où il était activement recherché par la gestapo, est-il arrivé chez mon père à Amayé ? D'après l'interrogatoire ils ne se connaissaient pas. Il avait sans doute su que Guy de Saint Pol était agent du même réseau et habitait dans un lieu suffisamment isolée pour qu'il puisse y trouver refuge quelque temps. Havart est resté 3 à 4 semaines dans la ferme de Livry.
La dénomination de "ferme de Livry " que l'on trouve dans des rapports allemands, n'est pas exacte. Il était réfugié dans une petite ferme appartenant à G.de Saint Pol située sur la commune d'Amayé sur seulles au lieudit "la vallée "en bordure de la Seulles laquelle délimite les deux communes d'Amayé et de Livry. De là, le centre du bourg de Livry est plus proche que le centre du bourg d'Amayé, d'où sans doute la dénomination de "ferme de Livry".
3/ Le 4 octobre 1943 un bombardier américain B 17, à cour de carburant, s'est écrasé sur la commune de Cahagnes mitoyenne de la commune d'Amayé sur Seulles. Mon père a recueilli, caché, habillé et nourri deux aviateurs, Harold Curtis et Harold Helstrom, durant quelques jours. Ensuite l'instituteur, Julien Favre, les aurait cachés 60 jours dans les locaux de la mairie à Onde-Fontaine. Ils regagnèrent l'Angleterre via Paris et l'Espagne, vraisemblablement par la filière du Réseau Marie-Odile. Nous sommes sûrs de leur retour aux États Unis car le 3 juillet 1946, H. Curtis écrivait à ma mère pour la remercier, ayant appris le massacre de Caen. Suite à leur demande mon père reçu à titre posthume la "Médaille de la Liberté". Les informations sur l'histoire de l'équipage de ce bombardier B-17, «Badger's Beauty V ", et sur les réseaux d'exfiltration qui œuvraient en Normandie, m'ont été communiqués par le Professeur Gérard Fournier (Cf La conférence qu'il a donné le 13 octobre 2020).
TEMOIGNAGES
Ce qui est sûr c'est que Jean Hébert et mon père étaient à partir du 24 mai seuls dans la cellule "28" suite au départ de Fernand Coudrey directement pour l'Allemagne le 23 ou 24 mai. Mon père écrira que ses camarades de cellule "F.C." et "A.C" › et "J.H." l'ont remis sur pieds grâce aux plats qu'ils recevaient de leurs familles, notamment le lapin préparé par la mère de Jean que mon père appréciait particulièrement. Mon père écrira le 24 mai que c'était le "grand confort" car il était seul avec "H". Il demandera à ma mère de contacter la mère de Jean pour lui remettre un mot de son fils, l'adresse devant lui être donnée par Madame Lallier ou le Curé de Saint Jean-Eudes. Ce doit être le courrier que détient Jean-Pierre Hébert. D'après mon père, les Frères Coudrey étaient contents de quitter la prison de Caen car ils estimaient que cela leur donnerait l'occasion de s'évader. D'autres prisonniers comme mon père vivaient plutôt dans l'espoir de la libération par les Alliés qu'il pensait très prochaine, et ne souhaitait pas être transféré.
Mon père et son camarade Jean, passèrent travailleur au 3ème étage pour balayer et laver. Cela, écrit-il, lui donne plus de liberté. Il le devait au P.P. un des gardiens français de la prison que ma mère connaissait.
Dans l'extrait du livre "Massacres nazis en Normandie" page 55 : "Vers midi, la soupe est distribuée aux survivants par Guy de Saint Pol, accompagné d'un jeune homme poussant la roulante ", le jeune homme n'est autre que Jean Hébert. Tous deux, occupèrent seuls la cellule "28" jusqu'au drame. Ensemble ils partagèrent la nourriture transmise par leurs familles, ensembles ils priaient, ensembles le 6 juin 44, ils quittèrent la cellule et l'un derrière l'autre ils descendirent les dernières marches conduisant à la courette.
(1)Jean Hébert, né le 13.1. 1926 est entré dans le groupe FTP de Caen à la fin de l'année 1943, il n'avait pas 18 ans. Il est arrêté le 11 février 1944 par un inspecteur de police français, et livré aux allemands. Avec Désiré Renouf et Colbert Marié ils furent à 18 ans les trois plus jeunes résistants fusillés le 6 juin. Jean Hébert n'a pas de lien familial les autres résistants "Hébert" figurant dans le "Livre Mémorial" du Conseil Général du Calvados, ni avec la famille Hébert de la ferme de Maizières (Cf. livre «Si près de la Liberté " par Gérard Fournier).
(2) Camille Blaisot, député du Calvados, ministre, arrêté le 2 mars 44, il meurt à Dachau le 24janvier 45.
(3) Fernand Coudrey né le 3.6.1898 était aussi du réseau «Zéro France " et d'autres réseaux O.M.C., Centurie, arrêté le 12 oct. 43, déporté et libéré au printemps 45. Fernand Coudrey rentré de déportation témoignera de la présence de Jean Hébert à la maison d'arrêt de Caen.
(4) André Coudrey né le 11.7.1910 était du réseau "Zéro France", arrêté le 25 avril 44, déporté, meurt le 24 avril 45 à Saschsenhausen.
Voici un autre témoignage, assez surprenant de mon père qui avait organisé une visite de sa femme à la prison pour la voir de loin,... .Je cite : "Si tu viens lundi à Caen pour le colis, je pourrai te voir par la fenêtre de ma nouvelle cellule. Tu prendras la rue à gauche juste avant celle de ... Je vois par la fenêtre la maison n°21, tu passeras donc sur ce trottoir. Je suis à la première fenêtre du 3ème étage à partir de l'angle des 2 corps de bâtiments. Je te ferai donc signe entre 2 et 3 heures à cette fenêtre. Ne fais aucun signe surtout (tu te ferais arrêtée). Fais semblant de ramasser quelque chose à terre, ce sera le signe que tu m'as vu. Ne reste pas longtemps. Passes deux fois c'est tout. Si je ne te vois pas le lundi 29, ce sera le jeudi après le colis de linge. Mais je compte sur toi le lundi. Je te verrai certainement mieux que tu me verras. Ce sera une telle joie pour moi, petite chérie ! ...." .
On n'a jamais su s'ils s'étaient entrevus.
L'exode.
La bataille dite "Bataille de Villers", dont on ne manque pas de récit ("La percée du Bocage" Album Mémorial Stéphane Jacquet éditions Heimdal) était si intense que les habitants d'Amayé et d'autres communes voisines reçurent par l'intermédiaire de leur Maire, Monsieur Delalande à Amayé sur Seulles, l'ordre d'évacuer le 7 juillet 44. Un convoi de 23 personnes du village s'était constitué avec pour matériel une carriole attelée avec le cheval de M. Delalande, des petites charrettes à bras et une vache pour nourrir les plus petits dont je faisais partie. ll se dirigeait vers Pont d'Ouilly dans l'Orne de l'autre côté du mont Pinçon, point culminant du Calvados (365m), où nous avions de la famille. Arrivés à Cahan, pour être à l'abri des bombardements nous dormions dans un petit tunnel qui servait à alimenter en eau un bras artificiel du Noireau, qui pour la circonstance avait été asséché. Ce n'est qu'à la mi-septembre que nous, grand-mère, mère, sœur et moi, regagnâmes Amayé.
L'annonce du massacre.
La Croix-Rouge avait pour mission d'effectuer les recherches sur les personnes disparues. Une sœur de ma grand-mère fit une demande auprès du délégué départemental de la Croix Rouge qu'elle connaissait en Loire-inférieure. Elle obtint une réponse par un message télégraphique le 23 août 44 : "Guy de Saint Pol libéré en juillet à Compiègne et évacué dans le Nord ".
Le 13 septembre ma grand-mère reçoit le courrier de confirmation qu'elle réexpédie à sa fille, ma mère. Elle le reçoit le 18 septembre tout juste rentrée l'exode, et c'est au même moment qu'elle appris, je ne sais comment, ni par qui, la nouvelle du massacre. Elle écrivit au délégué de la Croix Rouge le 30 septembre qui lui fit une réponse d'excuses. Tout cela laisse à penser de la grande confusion qui régnait à cette époque.
Le dossier de veuve de guerre.
Il n'est pas inutile de rappeler ce que fût le long et douloureux parcours des veuves de guerre pour obtenir la reconnaissance de leur statut. A titre d'exemple celui de ma mère:
Décembre 44, premier contact avec le service social du réseau, 63 avenue des Champs Elysée, Association Amicale Alliances, A.A.A.
Une première aide financière en février 1945. Ma mère était aidée par au moins deux personnes pour le travail de l'exploitation.
Pour la constitution du dossier elle a dû aller au moins deux fois à Paris. Comme toutes les autres familles, il lui fallait justifier de son statut de veuve de guerre, ce qui n'est pas facile quand il n'y a pas de certificat de décès :
-Attestation d'appartenance au réseau mars 1946 par Marie-Madeleine Fourcade.
-Certificat de service du 6 mai 1946, signé du Field Marschal Montgommery.
-Certificat du surveillant de la maison d'arrêt, Pierre Mahé, de novembre 1946.
-Certificat du surveillant chef du7 nov.1946 : "M. de Saint Pol détenu par les allemands et fût vraisemblablement exécuté par ces derniers le 6 juin 1944... "
Il y a toujours un papier qui manque !!!
-Certificat de non divorce décembre 1946.
-Notification du Ministère de la défense nationale (F.F.C.l.) du 4 mars 1947 de l'homologation du grade de sous-lieutenant par décret du 12 février 1947.
-Avis Officiel de Décès-Mort pour la France- du 6 août 1947.
Information du Centre d'Administration Territorial de Rennes du 22 août 1947 que la pension de veuve de guerre a pris effet le 31 juillet 1947
-Attestation d'appartenance aux F.F.C. qui ne fût délivrée que le 23 juin 1949.
Vint ensuite la reconnaissance pour l’honneur par Nomination, Légion d'Honneur (décret 11 janvier 1961), Croix de Guerre avec palme, Médaille de la Résistance et "Medal of Freedom " en octobre 1946.
1 / En juin 43, mon père a hébergé deux frères, Jean et Pierre Wichasky qui fuyaient le STO. Il les connaissait car ils venaient de Thouaré sur Loire où habitait sa mère (Loire-Atlantique). En septembre, leur présence commençant à se savoir, Ils décidèrent de partir et vécurent dans la clandestinité jusqu'en 1944, année durant laquelle ils s'engagèrent dans l'armée française.
Ma grande mère, très éprouvée par les deux guerres, n'a pas eu le cœur de m'en parler. Je |'ai appris en décembre 2009 et j'ai pu échanger avec l'un d'entre eux.
2/ La présence d'Havart chez Guy de Saint Pol est pour moi une découverte. Comment Havart qui fuyait sa région d'Amiens où il était activement recherché par la gestapo, est-il arrivé chez mon père à Amayé ? D'après l'interrogatoire ils ne se connaissaient pas. Il avait sans doute su que Guy de Saint Pol était agent du même réseau et habitait dans un lieu suffisamment isolée pour qu'il puisse y trouver refuge quelque temps. Havart est resté 3 à 4 semaines dans la ferme de Livry.
La dénomination de "ferme de Livry " que l'on trouve dans des rapports allemands, n'est pas exacte. Il était réfugié dans une petite ferme appartenant à G.de Saint Pol située sur la commune d'Amayé sur seulles au lieudit "la vallée "en bordure de la Seulles laquelle délimite les deux communes d'Amayé et de Livry. De là, le centre du bourg de Livry est plus proche que le centre du bourg d'Amayé, d'où sans doute la dénomination de "ferme de Livry".
3/ Le 4 octobre 1943 un bombardier américain B 17, à cour de carburant, s'est écrasé sur la commune de Cahagnes mitoyenne de la commune d'Amayé sur Seulles. Mon père a recueilli, caché, habillé et nourri deux aviateurs, Harold Curtis et Harold Helstrom, durant quelques jours. Ensuite l'instituteur, Julien Favre, les aurait cachés 60 jours dans les locaux de la mairie à Onde-Fontaine. Ils regagnèrent l'Angleterre via Paris et l'Espagne, vraisemblablement par la filière du Réseau Marie-Odile. Nous sommes sûrs de leur retour aux États Unis car le 3 juillet 1946, H. Curtis écrivait à ma mère pour la remercier, ayant appris le massacre de Caen. Suite à leur demande mon père reçu à titre posthume la "Médaille de la Liberté". Les informations sur l'histoire de l'équipage de ce bombardier B-17, «Badger's Beauty V ", et sur les réseaux d'exfiltration qui œuvraient en Normandie, m'ont été communiqués par le Professeur Gérard Fournier (Cf La conférence qu'il a donné le 13 octobre 2020).
TEMOIGNAGES
- Période internement.
Ce qui est sûr c'est que Jean Hébert et mon père étaient à partir du 24 mai seuls dans la cellule "28" suite au départ de Fernand Coudrey directement pour l'Allemagne le 23 ou 24 mai. Mon père écrira que ses camarades de cellule "F.C." et "A.C" › et "J.H." l'ont remis sur pieds grâce aux plats qu'ils recevaient de leurs familles, notamment le lapin préparé par la mère de Jean que mon père appréciait particulièrement. Mon père écrira le 24 mai que c'était le "grand confort" car il était seul avec "H". Il demandera à ma mère de contacter la mère de Jean pour lui remettre un mot de son fils, l'adresse devant lui être donnée par Madame Lallier ou le Curé de Saint Jean-Eudes. Ce doit être le courrier que détient Jean-Pierre Hébert. D'après mon père, les Frères Coudrey étaient contents de quitter la prison de Caen car ils estimaient que cela leur donnerait l'occasion de s'évader. D'autres prisonniers comme mon père vivaient plutôt dans l'espoir de la libération par les Alliés qu'il pensait très prochaine, et ne souhaitait pas être transféré.
Mon père et son camarade Jean, passèrent travailleur au 3ème étage pour balayer et laver. Cela, écrit-il, lui donne plus de liberté. Il le devait au P.P. un des gardiens français de la prison que ma mère connaissait.
Dans l'extrait du livre "Massacres nazis en Normandie" page 55 : "Vers midi, la soupe est distribuée aux survivants par Guy de Saint Pol, accompagné d'un jeune homme poussant la roulante ", le jeune homme n'est autre que Jean Hébert. Tous deux, occupèrent seuls la cellule "28" jusqu'au drame. Ensemble ils partagèrent la nourriture transmise par leurs familles, ensembles ils priaient, ensembles le 6 juin 44, ils quittèrent la cellule et l'un derrière l'autre ils descendirent les dernières marches conduisant à la courette.
(1)Jean Hébert, né le 13.1. 1926 est entré dans le groupe FTP de Caen à la fin de l'année 1943, il n'avait pas 18 ans. Il est arrêté le 11 février 1944 par un inspecteur de police français, et livré aux allemands. Avec Désiré Renouf et Colbert Marié ils furent à 18 ans les trois plus jeunes résistants fusillés le 6 juin. Jean Hébert n'a pas de lien familial les autres résistants "Hébert" figurant dans le "Livre Mémorial" du Conseil Général du Calvados, ni avec la famille Hébert de la ferme de Maizières (Cf. livre «Si près de la Liberté " par Gérard Fournier).
(2) Camille Blaisot, député du Calvados, ministre, arrêté le 2 mars 44, il meurt à Dachau le 24janvier 45.
(3) Fernand Coudrey né le 3.6.1898 était aussi du réseau «Zéro France " et d'autres réseaux O.M.C., Centurie, arrêté le 12 oct. 43, déporté et libéré au printemps 45. Fernand Coudrey rentré de déportation témoignera de la présence de Jean Hébert à la maison d'arrêt de Caen.
(4) André Coudrey né le 11.7.1910 était du réseau "Zéro France", arrêté le 25 avril 44, déporté, meurt le 24 avril 45 à Saschsenhausen.
Voici un autre témoignage, assez surprenant de mon père qui avait organisé une visite de sa femme à la prison pour la voir de loin,... .Je cite : "Si tu viens lundi à Caen pour le colis, je pourrai te voir par la fenêtre de ma nouvelle cellule. Tu prendras la rue à gauche juste avant celle de ... Je vois par la fenêtre la maison n°21, tu passeras donc sur ce trottoir. Je suis à la première fenêtre du 3ème étage à partir de l'angle des 2 corps de bâtiments. Je te ferai donc signe entre 2 et 3 heures à cette fenêtre. Ne fais aucun signe surtout (tu te ferais arrêtée). Fais semblant de ramasser quelque chose à terre, ce sera le signe que tu m'as vu. Ne reste pas longtemps. Passes deux fois c'est tout. Si je ne te vois pas le lundi 29, ce sera le jeudi après le colis de linge. Mais je compte sur toi le lundi. Je te verrai certainement mieux que tu me verras. Ce sera une telle joie pour moi, petite chérie ! ...." .
On n'a jamais su s'ils s'étaient entrevus.
- Après le 6 juin 44.
L'exode.
La bataille dite "Bataille de Villers", dont on ne manque pas de récit ("La percée du Bocage" Album Mémorial Stéphane Jacquet éditions Heimdal) était si intense que les habitants d'Amayé et d'autres communes voisines reçurent par l'intermédiaire de leur Maire, Monsieur Delalande à Amayé sur Seulles, l'ordre d'évacuer le 7 juillet 44. Un convoi de 23 personnes du village s'était constitué avec pour matériel une carriole attelée avec le cheval de M. Delalande, des petites charrettes à bras et une vache pour nourrir les plus petits dont je faisais partie. ll se dirigeait vers Pont d'Ouilly dans l'Orne de l'autre côté du mont Pinçon, point culminant du Calvados (365m), où nous avions de la famille. Arrivés à Cahan, pour être à l'abri des bombardements nous dormions dans un petit tunnel qui servait à alimenter en eau un bras artificiel du Noireau, qui pour la circonstance avait été asséché. Ce n'est qu'à la mi-septembre que nous, grand-mère, mère, sœur et moi, regagnâmes Amayé.
L'annonce du massacre.
La Croix-Rouge avait pour mission d'effectuer les recherches sur les personnes disparues. Une sœur de ma grand-mère fit une demande auprès du délégué départemental de la Croix Rouge qu'elle connaissait en Loire-inférieure. Elle obtint une réponse par un message télégraphique le 23 août 44 : "Guy de Saint Pol libéré en juillet à Compiègne et évacué dans le Nord ".
Le 13 septembre ma grand-mère reçoit le courrier de confirmation qu'elle réexpédie à sa fille, ma mère. Elle le reçoit le 18 septembre tout juste rentrée l'exode, et c'est au même moment qu'elle appris, je ne sais comment, ni par qui, la nouvelle du massacre. Elle écrivit au délégué de la Croix Rouge le 30 septembre qui lui fit une réponse d'excuses. Tout cela laisse à penser de la grande confusion qui régnait à cette époque.
Le dossier de veuve de guerre.
Il n'est pas inutile de rappeler ce que fût le long et douloureux parcours des veuves de guerre pour obtenir la reconnaissance de leur statut. A titre d'exemple celui de ma mère:
Décembre 44, premier contact avec le service social du réseau, 63 avenue des Champs Elysée, Association Amicale Alliances, A.A.A.
Une première aide financière en février 1945. Ma mère était aidée par au moins deux personnes pour le travail de l'exploitation.
Pour la constitution du dossier elle a dû aller au moins deux fois à Paris. Comme toutes les autres familles, il lui fallait justifier de son statut de veuve de guerre, ce qui n'est pas facile quand il n'y a pas de certificat de décès :
-Attestation d'appartenance au réseau mars 1946 par Marie-Madeleine Fourcade.
-Certificat de service du 6 mai 1946, signé du Field Marschal Montgommery.
-Certificat du surveillant de la maison d'arrêt, Pierre Mahé, de novembre 1946.
-Certificat du surveillant chef du7 nov.1946 : "M. de Saint Pol détenu par les allemands et fût vraisemblablement exécuté par ces derniers le 6 juin 1944... "
Il y a toujours un papier qui manque !!!
-Certificat de non divorce décembre 1946.
-Notification du Ministère de la défense nationale (F.F.C.l.) du 4 mars 1947 de l'homologation du grade de sous-lieutenant par décret du 12 février 1947.
-Avis Officiel de Décès-Mort pour la France- du 6 août 1947.
Information du Centre d'Administration Territorial de Rennes du 22 août 1947 que la pension de veuve de guerre a pris effet le 31 juillet 1947
-Attestation d'appartenance aux F.F.C. qui ne fût délivrée que le 23 juin 1949.
Vint ensuite la reconnaissance pour l’honneur par Nomination, Légion d'Honneur (décret 11 janvier 1961), Croix de Guerre avec palme, Médaille de la Résistance et "Medal of Freedom " en octobre 1946.
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