Du rôle de la résistance

En préambule, quelques photos
(ne concerne pas le réseau Alliance local qui ne pratique que le renseignement et donc il n'existe pas de photos correspondant  à ce type d'activité
   
  Sabotage Airan 15 avril 1942  Résistants FFI et Gi en Normandie
   
 Libération d'Ecouché par des FFI  Secteur Omaha Beach (Surrain). 7 juin 1944.
Gustave Joret, paysan normand vient en aide à cet officier des Affaires Civiles.
 Juste après la prise de cette photo, M. Joret a été tué par erreur par un soldat américain
 





Quel rôle a joué la Résistance en Normandie ?
Avant, pendant et après le débarquement, le rôle de la résistance normande est controversé. Jugé à l'époque de "non négligeable" par le chef des forces alliées en Europe, il est de nos jours relativisé par les historiens qui en limitent l'importance, surtout en ce qui concerne les actions de combat. Tout dépend de l'échelle de vision de la résistance que l'on aura...

  • Comment les résistants apprennent le débarquement ?
C’est par la BBC que les résistants apprennent le débarquement par la BBC. Ils attendent la diffusion de messages bien précis en écoutant la radio. Le grand public retient aujourd’hui les vers de Verlaine (« les sanglots longs des violons de l’automne blessent mon cœur d’une langueur monotone »). En réalité, la BBC diffusa de nombreux autres messages énigmatiques, chacun s’adressant à des groupes de résistants particuliers. Ce sont des phrases moins poétiques du genre « Il fait chaud à Suez » ou « les dés sont sur le tapis ». "les carottes sont cuites", "le chat sort et chasse", ou encore la deuxième partie de la première strophe du poême de Verlaine : "Blessent mon coeur d’une langueur monotone".
 La première partie, "Les sanglots longs des violons", avait quant à elle été diffusée dés le 1er juin pour inviter les résistants à se tenir prêts. Un premier message les informe de l’imminence du débarquement puis, quelques jours plus tard, le 5 juin, un second message leur commande de passer immédiatement à l’action.
  • Que doivent-ils faire en  faveur du débarquement du 6 juin 1944 ?
Ils doivent perturber la contre-offensive allemande vers les plages de Normandie avec  
-Le "plan vert" est déclenché le soir du 5 juin 1944, soit quelques heures avant le débarquement de Normandie. Il doit permettre de bloquer dans toutes les régions côtières de France, le transport des divisions allemandes de renfort, empêchant ainsi leur concentration et réduisant fortement leurs capacités opérationnelles. Il se réalise par toute une série de coupures simultanées de voies ferrées et de fils de télécommunications,
-le plan Tortue qui vise à interrompre ou gêner la circulation routière Ce dernier plan passe par exemple par l’abattage d’arbres sur la voie ou par l’inversion des panneaux de direction. Des bombardiers remplissent aussi ces missions, mais les résistants ont l’avantage d’être beaucoup plus précis que des bombes larguées à haute altitude.
-le plan rouge,  les résistants particulièrement  mal armés peuvent pratiquer  la guérilla, harcelant les arrières de l’ennemi mais en Normandie cela est impossible où ils n’ont pas pour mission de libérer la région…
  • Que font-ils réellement ?
L’annonce du débarquement  est un grand espoir pour la résistance mais les résistants normands se rendent compte très vite  qu’ils risquent trop à se découvrir. Les Alliés avancent beaucoup plus lentement qu’ils le pensaient et les troupes allemandes ne cessent de grossir pour repousser l’invasion.

Les résistants ne  sortent vraiment de l’ombre lorsque  le front ne se situe plus qu’à quelques kilomètres. Certains traversent alors les lignes pour informer les Alliés des points de défense allemande et les guider dans la campagne. Parfois, les Normands s’enhardissent jusqu’à libérer eux-mêmes des communes. Fin août 1944, dans l'Orne, les FFI (Forces françaises de l’Intérieur) chassent l’occupant de Mortagne, Longny et de nombreux villages du Perche.
  • La répression continue-elle ?
Parallèlement, la répression ne faiblit pas malgré l’urgence de la situation. Les groupes de Français qui collaborent avec la Gestapo comme  la bande à Hervé et la bande à Jardin continuent de  sévir dans le Calvados et l’Orne même s'ils doivent reculer  à l'arrière

  • Que deviennent ensuite les résistants ?
Certains continuent le combat en intégrant l’armée régulière, notamment la 2e division blindée du général Leclerc ou les bataillons de marche de Normandie. La guerre terminée, ils retrouvent souvent leur vie d’avant, quelques uns se lancent en politique. Dans le Calvados, Léonard Gille, un temps président du Comité départemental de Libération, échoue à la députation et doit se contenter d’être élu conseiller général.
  • Au final dans quel domaine les résistants ont-ils été efficaces ?
L’apport de la Résistance en matière de renseignement a été réellement essentiel, en témoigne l'exceptionnelle  carte réalisée par Douin grâce aux apports des membres de son rédseau



Quel  impact réel de  la Résistance  d'un point de vue global  ?

  • Des alliés reconnaissants
Pour le commandant des forces alliées en Europe, le général Dwight Eisenhower, "les FFI ont joué un rôle non négligeable dans la préparation du débarquement allié en Normandie et dans la libération de la France". 
 A l'époque, il avait évalué l'aide apportée par les résistants normands à l'équivalent de quinze divisions régulières. Mais en plus de la disponibilité de ces troupes, il soulignait la contribution des résistants au plan Vert, un ensemble d'actions de sabotage contre les transports de troupes et de munitions qui permit alors, en deux jours, de détruire 98 locomotives.
Selon le général américain William Donovan, chef de l'OSS, l'Office of Strategic Services qui se chargeait de l'aide aux mouvements de résistance, 80% des renseignements utiles lors de la libération de la France ont été fournis par les services secrets gaullistes.

  • La résistance, Oscar du meilleur second rôle ...
Même si les effectifs des FFI sont passés de 100 000 en janvier 1944 à 200 000 en juin puis à 400 000 en octobre de la même année, les historiens tempèrent le jugement porté sur le rôle de la résistance lors du débarquement.
Les résistants ont certes fourni d'importants renseignements sur le dispositif allemand le long des côtes avant le 6 juin 1944, mais leur rôle au combat a en revanche été négligeable face à l'énorme machine de guerre ennemie.
 « Que pouvaient faire quelques centaines de résistants au cœur d’une bataille gigantesque opposant des centaines de milliers d’hommes ? »  
"Il y avait 500 à 600.000 Allemands engagés dans la bataille de Normandie. Que voulez-vous que fassent quelques types face à ça ?", 
demande Jean Quellien, professeur à l'Université de Caen.
 "L'honneur est sauf, ils ont fait ce qu'ils pouvaient... Mais ils ne pouvaient pas faire grand chose".
Selon Olivier Wieviorka, professeur à Normale sup Cachan et auteur d'une "Histoire du Débarquement en Normandie", "avec ou sans la Résistance, la France aurait été libérée, mais pas de la même manière : la Libération aurait été plus difficile, plus sanglante, et moins rapide". Pour lui, "les Alliés n'ont jamais vraiment compté avant le Débarquement sur la Résistance qu'ils considéraient comme un bonus". "Mais dans l'ensemble, elle a joué un rôle qui a plutôt agréablement surpris les Alliés", notamment après le passage de l'armée régulière lorsqu'il s'est agi d'utiliser les résistants comme éclaireurs près des lignes allemandes, de leur faire garder des infrastructures comme des ponts ou encore de garder des prisonniers, observe-t-il.
Selon Olivier Wieviorka, les Alliés incluent bien tardivement la Résistance dans leur stratégie et, de toute façon, n’envisagent pas de l’armer en masse.
Voir son entretien ici.
En fait, la Résistance s'est avérée beaucoup plus combative en Bretagne, avec l'éclosion presque dès le Jour-J, de 30.000 FFI, rappelle M. Wieviorka. Ces résistants ont isolé la Bretagne, obligeant les Allemands à mettre parfois une semaine pour rejoindre la Normandie toute proche. Un délai précieux pour permettre aux Alliés de s'organiser.
En réalisant dés le début du mois de juin le parti qu'ils pouvaient tirer de l'appoint de ces résistants, les Alliés ont parachuté massivement des armes au profit des combattants bretons.

 Antony Beevor
Auteur du livre "D-Day et la bataille de Normandie", l'historien britannique Antony Beevor, souligne que les "molles collines normandes ne se prêtent guère au combat de maquis comme les régions montagneuses. On ne pouvait de ce fait, s'attendre à ce que des résistants à Caen se comportent comme des résistants yougoslave, qui ont livré de véritables batailles rangées contre la Wehrmacht".
A contrario, la Résistance a joué un rôle majeur en sabotant les voies ferrées et les lignes téléphoniques ennemies. "L'attaque des lignes de communication représente une contribution importante de la Résistance sur toute la Normandie car elle a retardé l'arrivée des renforts allemands", souligne M. Beevor.

 Michel Baldenweck (GHRis de Rouen) juge : "la Résistance ne peut éviter ni les sabotages allemands de dernière heure, ni le transport des troupes vers la Basse-Normandie. [Par contre], l’apport de la Résistance en matière de renseignement a été décisif ".

Jean-François Muracciole 
" Résistance ou pas, sans doute les Alliés auraient-ils libéré la France selon un calendrier guère différent. "

Et  la Résistance   dans le Calvados ?

Il faut d'abord préciser que le Calvados de part sa situation géographique a une position particulière et originale par rapport aux autres départements français : un département littoral fortement occupé, situé face à l'Angleterre, lieu possible pour un débarquement, avec un espace  côtier "Zone interdite", donc un espace stratégique. 
Rien ne favorise l'implantation de la résistance et pourtant elle s'organisa, très diversifiée. Pour la période 1940-1944, l'historien J Quellien dénombre  2500 personnes impliquées dans la résistance avec  21 mouvements et 41 réseaux différents d'importance très inégale, beaucoup apparus depuis 1942. La résistance fut particulièrement active pour le renseignement, une nécessité en vue du débarquement,  la preuve, elle fut pourchassée avec une  violence inouïe (massacre de la prison de Caen, le 6 juin 1944)  par les occupants. 
La population civile, ancrée à droite, encadrée par les notables et l'église est prudente et manque parfois de conviction, mais n'hésitera pas à afficher son mécontentement dès1940 et à agir discrètement  pour aider les réfractaires, les aviateurs alliés, les juifs et les résistants, ce qu'on considère comme une forme de  "résistance civile". Ces hommes et femmes qui ont refusé de pactiser avec les allemands ont parfois sauvé des vies par fraternité, sans être des résistants et sans  jamais rien demander en retour. Cela ne se mesure pas...
En 1944, spontanément  tous les civils aident les alliés, ensuite la population se rallie massivement à De Gaulle après sa visite dans le Bessin et sera longtemps fidèle au gaullisme. Pourtant, ce département dévasté en 1944, a beaucoup souffert de la libération avec 8000 morts et de nombreuses villes et villages détruits, sans oublier les déportés et les centaines de résistants exécutés.

Si les historiens modèrent l'impact global de la résistance, il faut tenir compte du fait que les résistants n’ont pas pour mission de libérer  le Calvados, ils ne disposent  ni des moyens humains et matériels, ni de l'armement nécessaire, ni de la formation indispensable. De toute façon, les Alliés  n'ont jamais inclus  la Résistance dans leur stratégie, dans le Calvados, elle était essentielle  uniquement pour le renseignement, et, cet objectif de "renseigner" a été parfaitement réalisé par la résistance, et, en particulier, par le réseau Alliance : la fameuse carte de 17m  de long de R Douin est restée dans les annales !
Pourtant,  ce résultat,  oublié ou minoré, est souvent considéré comme mineur, alors que la résistance  a payé un lourd tribut en 1944. 


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